samedi 4 février 2023

Jour 346 - Kyiv obtiendra des armes de plus longue portée


(Kyiv) Les États-Unis ont annoncé vendredi une nouvelle aide militaire de plus de 2 milliards de dollars à l’Ukraine, incluant des bombes tirées depuis le sol qui pourraient quasiment doubler la portée de la force de frappe ukrainienne contre les Russes. 

Il s’agit des « GLSDB », des bombes de petit diamètre fabriquées par Boeing et Saab, pouvant voler jusqu’à 150 km et donc menacer des positions russes derrière les lignes de front. 

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a remercié son homologue américain Joe Biden après l’annonce. 

« Plus nos armes sont de longue portée et plus nos troupes sont mobiles, le plus tôt se terminera la brutale agression de la Russie », a-t-il tweeté. 

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Les « GLSDB » donneront aux Ukrainiens « une capacité de plus longue portée […] qui leur permettra de mener des opérations de défense de leur territoire et de reprendre leur territoire souverain », a précisé à la presse le porte-parole du Pentagone, Pat Ryder. 

L’Ukraine demande aux États-Unis des munitions pouvant aller plus loin que les roquettes Himars (80 km). 

 Ces GLSDB peuvent donner aux forces ukrainiennes la capacité de frapper des positions dans le Donbass, les régions de Kherson et Zaporijjia, et le nord de la Crimée. 

Cela pourrait notamment menacer les dépôts d’armes russes. 

Selon Saab, ces armes pourraient atteindre une cible sous n’importe quel angle à un mètre près. 

« La précision des GLSDB est si élevée qu’elles peuvent frapper dans le rayon d’un pneu de voiture », affirme Saab sur son site. 

À quand la livraison ? 
En décembre, John Hardie et Bradley Bowman, du centre de réflexion Fondation pour la défense des démocraties, avaient écrit que les GLSDB pouvaient être tirées à partir de plusieurs types de lanceurs, y compris les Himars et les M270 MLRS déjà utilisés en Ukraine. 

« Mais elles peuvent aussi être tirées par des lanceurs non traditionnels, comme de l’arrière d’un camion ou d’un conteneur quelconque, cachés au vu de tous », avaient-ils ajouté. 

« Il serait donc plus difficile pour les forces russes de trouver et de détruire le système. » 

Mais ils avaient dit que les premières livraisons à l’Ukraine pourraient prendre jusqu’à neuf mois. 

Interrogé à ce sujet, le Pentagone n’avait pas répondu dans l’immédiat. 

Un porte-parole de Boeing a dit que le groupe ne donnerait pas de détails sur les délais de livraison. 

Cette assistance sécuritaire américaine de presque 2,2 milliards de dollars inclut également « des capacités cruciales de défense aérienne pour aider l’Ukraine à défendre sa population », « des véhicules d’infanterie blindés » et des munitions pour le système Himars de lance-roquettes, a indiqué le département de la Défense. 

Depuis le début de l’invasion russe fin février 2022, les autorités américaines ont alloué plus de 29,3 milliards en assistance sécuritaire à l’Ukraine, selon le Pentagone. 

« Les États-Unis continueront à travailler avec leurs alliés et partenaires pour fournir à l’Ukraine les capacités de répondre à ses besoins immédiats sur le champ de bataille et ceux sur le plus long terme en matière d’assistance sécuritaire », assure un communiqué du département. 

Des fonds saisis à un oligarque russe permettront d’aider l’Ukraine 
Le département américain de la Justice a annoncé vendredi le premier transfert de fonds russes confisqués, dans le but d’aider l’Ukraine, selon la chaîne CNN. 

« J’annonce aujourd’hui avoir autorisé le tout premier transfert de fonds russes saisis, destinés à l’Ukraine », a déclaré Merrick Garland, précisant que les actifs confisqués faisaient suite à l’inculpation de l’oligarque Konstantin Malofeïev en avril. 

Cette somme ira au département d’État « pour soutenir le peuple ukrainien », a affirmé le secrétaire. 

Le procureur général ukrainien Andriï Kostine, présent à ses côtés, s’est félicité de ce transfert « d’un montant de 5,4 millions de dollars » pour « reconstruire l’Ukraine ». 

« Tous les Ukrainiens ont, d’une façon ou d’une autre, souffert de cette guerre. Nous devons nous assurer que le peuple ukrainien reçoive une compensation pour les énormes dommages subis », a-t-il écrit sur Twitter. 

Le milliardaire russe Konstantin Malofeïev est considéré comme l’une des principales sources de financement des séparatistes prorusses dans l’est de l’Ukraine. 

Il avait été inculpé pour avoir « tenté d’échapper aux sanctions en utilisant des complices pour acquérir et diriger en cachette des médias à travers l’Europe », selon Washington. 

Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, les États-Unis ont annoncé de nombreuses salves de sanctions contre des entreprises ou des citoyens russes. 

Les sanctions américaines visent notamment à geler les avoirs éventuels de ces personnes aux États-Unis et interdisent toutes les interactions entre elles avec des banques américaines. 

Bombardements russes [...] 
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Ania Tsoukanova et Phil Hazlewood, dans l’est de l’Ukraine 
Agence France-Presse
La Presse, le 3 février 2023

vendredi 3 février 2023

Vendredi Jour 345 - La Russie menace de «répondre» aux livraisons d’armes


Vladimir Poutine a juré jeudi avoir de quoi « répondre » aux Occidentaux livrant des armes à l’Ukraine, une menace qui intervient en pleines conjectures sur une nouvelle escalade militaire russe. 

S’exprimant pendant les cérémonies du 80e anniversaire de la victoire soviétique à Stalingrad, il a établi un nouveau parallèle entre l’offensive de la Russie contre son voisin et la Seconde Guerre mondiale. Pour M. Poutine, le conflit en Ukraine s’inscrit dans l’héritage du triomphe de l’URSS face à Hitler, et il a accusé les responsables ukrainiens d’être des « néonazis » orchestrant le « génocide » des populations russophones du pays. 

Jeudi, il a estimé que l’histoire se répétait avec la fourniture de chars allemands à l’Ukraine pour combattre la Russie. « C’est incroyable, mais des chars allemands Leopard nous menacent à nouveau », a souligné M. Poutine, qui s’exprimait de Volgograd (ex-Stalingrad), avant d’ajouter : « Nous avons de quoi répondre, et ça ne se limitera pas à des blindés. »
 

Dans la foulée, son porte-parole, Dmitri Peskov, a précisé que la Russie userait de tout son potentiel pour répliquer aux livraisons d’armes occidentales : « Quand apparaîtront de nouvelles armes fournies par l’“Occident collectif”, la Russie utilisera pleinement son potentiel existant pour répondre. » 

M. Poutine avait tenu des propos similaires l’automne dernier, interprétés comme une allusion à l’arme nucléaire. 

La Russie est en train de concen­trer ses forces, nous le savons tous. Elle veut se venger non seulement de l’Ukraine, mais aussi de l’Europe libre. 
— Volodymyr Zelensky 

Après de longues tergiversations de crainte de provoquer une aggravation du conflit, les Occidentaux ont finalement récemment accepté d’envoyer des chars modernes à l’Ukraine, des Leopard de conception allemande, des Abrams américains et des Challenger britanniques. Mais Kiev n’a pas obtenu pour l’instant les missiles de haute précision d’une portée de plus de 100 km dont l’armée dit avoir besoin pour frapper les lignes logistiques russes. 

Offensives à l’horizon [...] 
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Agence France-Presse à Moscou 
Le Devoir, 2 février 2023

jeudi 2 février 2023

Jour 344 - La police russe saisit les pancartes d’une artiste peintre pacifiste russe au lendemain de son exposition

Les images pacifistes semblent interdites en Russie...


(Saint-Pétersbourg) La police russe a saisi mercredi les pancartes pacifistes d’une artiste peintre de 77 ans, au lendemain de l’inauguration de son exposition à Saint-Pétersbourg, a indiqué un parti d’opposition russe qui avait accueilli l’évènement dans ses locaux. 

Inaugurée mardi soir dans les locaux de l’antenne locale du parti d’opposition Iabloko, l’exposition était constituée d’une vingtaine de pancartes et de tableaux crées entre 2014 et 2022 par Elena Ossipova, surnommée la « conscience de Saint-Pétersbourg » et farouche opposante à toute guerre. 

Mercredi, « la police a saisi les tableaux pacifistes de Elena Ossipova », a indiqué le parti Iabloko dans un communiqué. 

Les policiers sont descendus dans les locaux de l’antenne locale du parti en affirmant avoir reçu une alerte à la bombe, selon la même source. 

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Si aucune bombe n’a été trouvée, la police a « découvert sur les murs des images graphiques dessinées sur des toiles et du carton, qui contiennent probablement de fausses informations sur les forces armées russes », selon un protocole policier cité dans le communiqué.   

« Les œuvres artistiques ont été saisies […] et emportées par la police sans même être dûment emballées », souligne Iabloko. 

Parmi les pancartes de l’artiste figurait notamment celle intitulée Les yeux de la conscience  : on y voit le visage d’une petite fille aux grands yeux, et une phrase en bas de la pancarte, en russe et en ukrainien : « Maman, j’ai peur de la guerre ». Le régime du président russe Vladimir Poutine a accéléré la répression contre ses détracteurs, dans la foulée de l’offensive russe lancée en février dernier en Ukraine. 

Ainsi, les autorités ont introduit une loi prévoyant jusqu’à 15 ans de prison pour toute publication d’information sur l’armée russe jugée « fausse ». 

Mme Ossipova est connue depuis plusieurs années comme une farouche opposante à la politique de Vladimir Poutine et à toute sorte de conflit armé. 

Elle était sortie avec une pancarte pacifiste pour la première fois en 2002, après la prise d’otages du théâtre Doubrovka de Moscou par des combattants tchétchènes.   

Depuis, rares sont les actions de protestation à Saint-Pétersbourg qui se déroulent sans elle.   

Interpellée à plusieurs reprises par la police, elle voit souvent ses pancartes confisquées. 

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Agence France-Presse 
La Presse, le 1er février 2023

mercredi 1 février 2023

Jour 343 - Un sommet Ukraine prévu à Kyiv vendredi



(Kyiv) L’Ukraine et l’Union européenne tiendront vendredi un sommet à Kyiv, le gouvernement ukrainien se félicitant de ce « signal fort » envoyé à Moscou près d’un an après le début de l’invasion russe. 

De son côté, l’armée russe, à l’offensive ces derniers jours, a revendiqué mardi la conquête d’un village près de Bakhmout, point chaud des combats dans l’Est de l’Ukraine. 

Le sommet avec les vingt-sept est une étape importante, plusieurs mois après l’obtention par Kyiv du statut de candidat officiel à l’adhésion à l’UE. 

Dans son adresse de mardi soir, M. Zelensky a espéré que ce sommet reflétera un haut « niveau de coopération et de progrès » avec l’UE. « Nous attendons des nouvelles pour l’Ukraine », a-t-il dit. 

« Le fait que ce sommet se tienne à Kyiv est un signal fort adressé tant à nos partenaires qu’à nos ennemis », s’était félicité plus tôt le premier ministre Denys Chmygal, disant « attendre du sommet une évaluation intermédiaire positive de nos efforts pour l’intégration européenne ». 

Ces deux journées doivent permettre à « l’Europe de croire en la victoire de l’Ukraine », a-t-il insisté. 

Elles se dérouleront quelques jours après que les Occidentaux ont donné leur feu vert, après de longues tergiversations, pour livrer à l’armée ukrainienne des chars lourds extraits de leur arsenal. 

Entre 120 et 140 chars 
Selon le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba, l’Ukraine attend « entre 120 et 140 » tanks occidentaux pour repousser l’armée russe. 

C’est la première fois que Kyiv révèle le nombre total des blindés lourds modernes promis par ses alliés occidentaux. 

L’Ukraine avait précédemment indiqué qu’il lui faudrait plusieurs centaines de ces chars lourds, des missiles de longue portée et des avions pour pouvoir mener des contre-offensives à même de reconquérir les territoires ukrainiens occupés par la Russie. 

D’autant que le processus de livraison pourrait prendre des mois, selon plusieurs chancelleries, du fait de la nécessité d’organiser la maintenance des chars sur place et la formation des militaires ukrainiens. 

Paris a de son côté annoncé mardi que la France allait fournir à l’Ukraine 12 canons Caesar de 155 mm supplémentaires, en plus des 18 déjà livrés. 

Mais ces pièces très précises et mobiles n’ont pas la portée de plus de 100 kilomètres dont l’Ukraine dit avoir besoin pour détruire les lignes d’approvisionnement et les dépôts de munitions russes. 

Le président américain Joe Biden a, lui, indiqué mardi qu’il allait discuter avec M. Zelensky de ses besoins en armes. 

« Nous allons parler », a-t-il dit à un groupe de journalistes à la Maison-Blanche après avoir répondu la veille par la négative à une question sur son intention de fournir des avions de combat F-16 à l’Ukraine, qui les réclame. 

Le président américain Joe Biden a opposé lundi un refus catégorique à l’idée d’envoyer à l’Ukraine des avions de combat américains de type F-16 fabriqués par Lockheed Martin, capables de frappes de longue portée susceptibles de faire monter les tensions avec Moscou. 

Selon le Wall Street Journal, une société de défense américaine, General Atomics, a proposé à Kyiv de lui vendre deux drones Reaper MQ-9 pour un dollar symbolique. Le coût du transport en Ukraine (10 millions de dollars) et de la maintenance (8 millions de dollars par an) seraient supportés par Kyiv, affirme le journal. Le gouvernement américain n’a fait aucun commentaire sur cette information. 

Crainte d’escalade [...] 
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Stanislav Doshchitsyn et Arman Soldin à Bogoyavlenka 
Agence France-Presse 
La Presse, Le 31 janvier 2023

mardi 31 janvier 2023

Jour 342 - Kyiv dément les progrès de l’armée russe à Vougledar


(Kyiv) L’Ukraine a démenti lundi que les troupes russes progressaient, comme l’affirme Moscou, près de la ville de Vougledar, nouveau point chaud du front dans l’est de l’Ukraine où les combats s’intensifient ces derniers temps.  

« Nos unités continuent d’avancer […] Des unités se sont établies dans l’est de Vougledar et le travail se poursuit dans les environs », avait affirmé dans la matinée le chef de l’occupation russe dans la région de Donetsk, Denis Pouchiline, cité par les agences russes. 

Un porte-parole de l’armée ukrainienne responsable de cette zone, Ievguen Ierine, a, lui, assuré auprès de l’AFP que les attaques russes dans la zone avaient échoué.   

Selon lui, les forces ukrainiennes ont pu repousser les Russes à l’aide d’« armes à feu et de l’artillerie ».   

« L’ennemi n’a pas enregistré de succès et s’est replié. Nous n’avons pas perdu nos positions », a soutenu M. Ierine.   

Pour sa part, M. Pouchiline a affirmé que l’armée ukrainienne s’était retranchée dans un secteur qui compte « un grand nombre de sites industriels et de bâtiments en hauteur », ce qui facilite les opérations défensives. 

« Nous partons du principe que l’ennemi va résister », a-t-il poursuivi. 

De son côté, le ministère russe de la Défense est resté vague, affirmant que ses troupes « ont pris des positions plus avantageuses » aux abords de Vougledar en infligeant des pertes aux forces ukrainiennes.   

Vougledar, ville minière qui comptait 15 000 habitants avant l’offensive russe, est située 150 kilomètres au sud de Bakhmout, autre point chaud du front oriental que l’armée russe cherche à prendre depuis plus de six mois au prix de lourdes pertes. 

Denis Pouchiline a précisé lundi que « des combats acharnés » étaient en cours près de Bakhmout et qu’il était « trop tôt » pour évoquer un encerclement de la ville par les troupes russes. 

« Des combats sont en cours, nous tenons les lignes de défense en leur infligeant de pertes », a de son côté commenté un autre porte-parole militaire ukrainien, Serguiï Tcherevaty.   

 Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a affirmé dimanche que Bakhmout, Vougledar et d’autres zones de la région de Donetsk subissaient « des attaques russes constantes ». 

Le Kremlin a juré de conquérir l’ensemble de la région de Donetsk après avoir revendiqué en septembre son annexion avec trois autres régions ukrainiennes : Louhansk dans l’Est, Kherson et Zaporijjia dans le Sud. 

La Norvège veut envoyer des chars « aussi vite que possible » 
La Norvège compte envoyer des chars Leopard 2 à l’Ukraine « aussi vite que possible », a déclaré lundi le ministre norvégien de la Défense, laissant entendre que ces livraisons pourraient intervenir fin mars. 

La semaine dernière, le pays scandinave avait annoncé son intention de fournir à Kyiv un certain nombre de Leopard 2, dont 36 exemplaires sont en service au sein de son armée de Terre. 

« Nous n’avons pas encore déterminé le nombre », a déclaré le ministre de la Défense, Bjørn Arild Gram, lundi. « C’est important que cela soit coordonné de manière étroite avec les partenaires, de sorte que cela soit un don qui fasse une différence pour l’Ukraine ». 

« Nous souhaitons que cela se fasse aussi vite que possible, bien entendu. Il y a un besoin urgent », a-t-il ajouté en marge d’une visite d’un site d’assemblage de missiles antiaériens NASAMS, de conception américano-norvégienne, à Kongsberg, dans le sud-est de la Norvège. 

Évoquant un effort concerté entre alliés, M. Gram a rappelé que l’Allemagne avait mentionné des livraisons de Leopard 2 « fin mars ». La semaine dernière, le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, disait viser « fin mars, début avril » pour la livraison de chars, dont Berlin compte donner 14 exemplaires. 

Le ministre norvégien a fait valoir les délais nécessaires pour obtenir le feu vert des livraisons, pour la formation des unités ukrainiennes à l’utilisation de cet engin ainsi que des questions de logistique. 

« C’est une assez grosse opération, mais on souhaite que cela aille aussi rapidement que possible », a-t-il insisté. 

Plusieurs autres pays occidentaux ont exprimé leur intention de fournir rapidement des chars lourds à l’Ukraine, à l’instar du Royaume-Uni qui compte livrer des Challenger fin mars. 

Interdiction pour les fonctionnaires ukrainiens de partir en vacances à l’étranger [...] 
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Agence France-Presse 
mis à jour le 30 février à 11 h 51

lundi 30 janvier 2023

Jour 341 - Sauver les enfants à tout prix


Ce sont les enfants volés d’Ukraine. Ils sont au moins 13 000, transférés de force en Russie depuis le début de la guerre. Là-bas, on les transforme en bons petits Russes. Et ils seraient encore plus nombreux, sans le courage d’Ukrainiens qui ont tout risqué, dans les territoires occupés, pour cacher des orphelins. 

Les enfants avaient appris leur histoire par cœur. Si on leur posait des questions, ils raconteraient qu’ils venaient d’un village bombardé, au front, et qu’ils s’étaient réfugiés chez leur tante Halyna, dans la ville occupée de Kherson. 

Ils avaient des consignes à respecter : interdiction de s’adresser aux étrangers et de s’éloigner de leur « tante », ne serait-ce que de quelques mètres. Surtout, ne jamais parler du centre de réhabilitation. À personne. 

L’enjeu était énorme. S’ils étaient découverts, ces enfants seraient emmenés loin de tout ce qu’ils avaient connu pour être transformés en bons petits Russes. 

 Ils seraient dépouillés de leur identité, de leur langue, de leur culture. Endoctrinés. Reprogrammés. Comme des milliers d’autres enfants enlevés depuis le début de la guerre en Ukraine. 

C’était à la mi-octobre. L’établissement dont ils devaient impérativement taire le nom, c’était le Centre de réhabilitation sociale et psychologique pour enfants de Stepanivka, en périphérie de Kherson. 

Les forces russes, anticipant leur retrait de cette grande ville du sud de l’Ukraine, étaient déterminées à emmener des enfants avec elles. Beaucoup d’enfants.

Les rafles se succédaient dans les orphelinats et les autres établissements pour enfants de Kherson. Le 19 octobre, 15 pensionnaires du Centre de réhabilitation avaient été transférés de force en Russie. 

Les autres risquaient maintenant le même sort. Alors, les employés du centre ont élaboré un plan secret pour les garder en Ukraine. 

 *** 

Au début de la guerre, 52 enfants étaient hébergés au Centre de réhabilitation, raconte son directeur, Volodymyr Sahaidak. Parmi eux, il y avait quelques orphelins, mais surtout des enfants pris en charge par l’État ; l’établissement était l’équivalent ukrainien d’un centre jeunesse. 

« Pendant les trois premiers mois de la guerre, nous espérions que le gouvernement ukrainien nous évacue vers un endroit plus sûr. » Mais les risques étaient trop grands. « Quand j’ai compris qu’il n’y aurait pas d’évacuation, j’ai su ce qu’il fallait faire. » 

Il fallait cacher les enfants. 

Volodymyr Sahaidak savait que la Russie chercherait à les prendre. C’est ce qu’elle faisait, depuis 2014, dans les territoires occupés des oblasts de Louhansk et de Donetsk. 

Le directeur a réussi à confier la plupart des pensionnaires à des membres de leur famille. Mais certains n’avaient nulle part où aller. Dix-sept enfants avaient pu se cacher en catastrophe, le 19 octobre, lorsque des représentants russes étaient venus chercher 15 de leurs camarades. 

Après cette rafle, ils ne pouvaient plus rester au centre. C’était trop dangereux. 

Alors, le 20 octobre, les employés ont convenu de se répartir les 17 enfants et de les emmener chez eux, en inventant cette histoire de neveux et nièces rescapés du front pour les voisins trop curieux. 

Tout s’est passé très vite. Halyna Kulakovska a emmené trois enfants dans son appartement du centre de Kherson. « Je n’ai pas eu le temps d’y penser, raconte-t-elle. Ce n’est qu’après l’avoir fait que j’ai commencé à réaliser les conséquences que cela pourrait avoir, si je me faisais prendre. » 

Tante Halyna, c’était elle. Si les Russes avaient découvert que nous cachions des enfants, ils les auraient envoyés en Russie – et moi dans une salle de torture. 

Oksana Koval a hébergé en secret des enfants de 3, 8 et 9 ans. « Avant de croiser des gens, dans la rue, je leur rappelais : je suis tante Oksana. » Au parc, les enfants oubliaient parfois la consigne. Tout à leurs jeux, ils s’adressaient à leur éducatrice comme ils l’avaient toujours fait : « Madame Oksana ! Madame Oksana ! » 

Le sang de l’éducatrice se glaçait. « Chut ! Chut ! C’est tante Oksana », les grondait-elle à voix basse. 

Une autre employée, qu’on ne peut nommer pour des raisons de sécurité, a emmené cinq enfants chez elle. Les dix kilomètres qui séparaient Stepanivka et le centre de Kherson comptaient deux contrôles routiers. « Au premier point de contrôle, ça s’est bien passé, raconte Volodymyr Sahaidak. Au second, les soldats étaient plus suspicieux. » 

« Qui sont ces enfants ? Où les amènes-tu ? », a demandé un soldat à l’employée. Il lui a ordonné de descendre de la voiture, pendant qu’un autre soldat interrogeait la plus âgée des enfants. « Qui es-tu ? Où sont tes parents ? » L’adolescente a joué le jeu ; elle avait bien appris son rôle. 

Les soldats les ont laissés passer. 

« Chaque jour était terrifiant, confie Halyna Kulakovska. Près de chez moi, il y avait un immeuble où habitaient des Russes. Leur centrale de police n’était pas loin non plus. Ils étaient partout, comme des coquerelles. » 

Pourquoi s’exposer à un tel danger ? « Ce sont nos enfants, répond Volodymyr Sahaidak. Ce que font les Russes, c’est un crime. Il n’y a pas de pire crime que de voler des enfants. » 

46 bambins volés [...] 
La Presse en Ukraine 
Texte Isabelle Hachey, photos Martin Tremblay 
Envoyés spéciaux La Presse, le 29 janvier, publié à 5 h

dimanche 29 janvier 2023

Jour 340 - Dans un village en ruines, le salon d’un enseignant devient une école de fortune


(Chandrygolové) Oleksandre Pogorielov remonte parfois la route qui mène à l’école de son village de l’est de l’Ukraine, où il a enseigné pendant plus de deux décennies. Mais au lieu de classes et de bavardages, il n’y a plus que des ruines silencieuses. 

Le bâtiment de l’école a été détruit en avril lorsque le hameau et la région environnante ont servi de ligne de front pour les combats entre forces russes et ukrainiennes. 

Aujourd’hui, cet homme de 45 ans n’y retourne que pour récupérer le matériel qui a survécu aux bombardements et enseigner à la poignée d’enfants restant dans une salle de classe de fortune, improvisée dans son salon. 

« Que peut encore ressentir un enseignant quand on voit que tout est détruit ? », lance Oleksandre en se tenant debout devant l’école en ruines, comme des dizaines d’autres bâtiments du village où il a grandi. 

Selon l’UNICEF, des centaines d’établissements scolaires ont été endommagés ou détruits en Ukraine depuis le début de l’invasion russe, poussant des millions d’enfants à se replier vers l’enseignement en ligne. 

La Russie accuse, elle, l’armée ukrainienne d’utiliser des écoles et d’autres infrastructures civiles pour abriter ses troupes et stocker des munitions. Une pratique dont Moscou est aussi accusée. 

Le village de Chandrygolové, désormais vidé de la quasi-totalité de ses 1000 habitants d’avant-guerre, mais qui compte encore 15 enfants, n’a plus accès à l’électricité ni à l’Internet. 

Malgré les difficultés, Oleksandre pense « qu’il vaut mieux donner des cours en présentiel ». « Un médecin doit soigner ses patients et un enseignant doit enseigner aux enfants », ajoute-t-il. 

C’est pourquoi, lorsque l’école a été détruite, il a décidé de donner des cours chez lui, « pour que les enfants puissent interagir ». 

Seulement l’ukrainien 
Désormais, chaque jour, quelques élèves se retrouvent dans le salon d’Oleksandre et de sa femme Larissa, tandis que des chats se prélassent près du poêle à bois et des canards cancanent dans la cour. 

Les murs du salon sont tapissés d’affiches récupérées dans le bâtiment de l’école, montrant l’alphabet et la syntaxe. 

Dans un coin se trouve un microscope que les élèves ont utilisé pour examiner des cellules pour une leçon de biologie. Des livres, certains tirés d’une cave près de l’école, sont empilés sur des étagères. 

Oleksandre enseigne à 11 élèves âgés de 4 à 16 ans la langue et la littérature ukrainiennes, la littérature étrangère, la biologie, la géographie et les mathématiques. 

« Pour ce qui est des classes supérieures, ce serait difficile pour moi d’enseigner les mathématiques – je devrais d’abord les apprendre moi-même », affirme-t-il en riant. 

La langue et la littérature russes faisaient autrefois partie du programme dans cette région majoritairement russophone. Mais plus maintenant. 

Lorsqu’on lui demande pourquoi, il répond : « Je ne sais pas, je n’enseigne plus que la langue et la littérature ukrainiennes maintenant ». 

Selon lui, les parents ont soutenu le retrait du russe, mais le village est encore secoué, comme beaucoup d’autres communautés de la région de Donetsk, entre sympathies pro-ukrainiennes et prorusses. 

Avenir incertain [...] 
Pour lire la suite et l’article en entier, 

Susannah Walden, Agence France-Presse 
La Presse, le 28 janvier 2023