samedi 16 mars 2013

Une autre espèce en voie de disparition...!



Chronique de Josée Blanchette publiée dans Le Devoir, le 15 mars 2013

Le son du silence

À la poursuite d'une espèce en voie de disparition

«Toutes les épreuves qui fondent sur vous peuvent être surmontées par le silence.» – Abbé Poemen

« La semaine dernière, la ville bruissait doucement, les moteurs avaient déserté les pavés le temps d’une relâche, partis tonitruer sous d’autres cieux. J’ai retrouvé un quartier moins agressant, plus convivial, capable de sourire aux passants, de ralentir, à hauteur d’homme. Et j’ai repris le pouls du stress lié aux bruits.

C’est en lisant le magnifique essai In Pursuit of Silence, de l’auteur new-yorkais George Prochnik, que l’immensité du défi associé à cette forme de pollution diurne et nocturne m’est apparue comme une des batailles les plus importantes du siècle à venir.

Pas de spiritualité sans silence, pas de création non plus, pas de capacité de réflexion ou décisionnelle sans son accord tacite, pas de sens sans ce sens souverain. Il arrive du silence ce qui est advenu de l’eau. Plus jeune, je puisais des écrevisses dans les ruisseaux de l’Estrie… mon fils ne connaîtra pas cette joie. Lui reste le beurre à l’ail.

Déjà, les effets secondaires du bruit commencent à se faire sentir avec cette ébauche de printemps qui nous convie à nouveau vers les fenêtres ouvertes. C’en est terminé du cocon ouaté nous tenant lieu d’intérieur, de cette isolation blanche naturelle, d’un semblant de silence associé à la solitude hivernale.

La lecture silencieuse du livre de George Prochnik m’aura convaincue d’une chose : nous devenons de plus en plus sourds, les uns à cause de l’âge, les autres n’ayant que leur iPod à blâmer. Et plus nous serons sourds, plus nous ferons grimper le son, pris dans cette spirale infernale.

Cela m’a frappée dernièrement, alors que j’étais invitée par les Amis de la montagne à une marche nocturne en raquettes. Je m’attendais à une pieuse randonnée sur le mont Royal, à la jonction de la religion urbaine et de la secte écologique. J’ai eu droit à plus de décibels que je ne peux en emmagasiner en un mois. Musique énergique, réchauffements hurlés dans un micro par une animatrice en phase maniaque qu’on aurait dit embauchée pour nous motiver jusqu’au camp de base de l’Annapurna, pétards assourdissants (ouch !) pour signaler le départ, bénévoles survoltés le long de ce parcours de… deux kilomètres. Bref, plus fatiguée par l’exploit auditif que physique, pollution sournoise commanditée, j’ai retrouvé le calme de la coquille de mon auto avec soulagement. Imaginez une soirée chez les Amis du VTT…

Et si tu n’existais pas

Sous ses faux airs guillerets, dynamiques, jeunes, actifs et stimulants, le bruit est en passe de devenir une forme de fast-food auditif. Les conséquences commencent à se faire sentir, nous préviennent les spécialistes de l’audition ; la déferlante de jeunes affligés du tympan ne semble pas vouloir ralentir. On parle de 150 % d’augmentation des consultations chez les 25 à 27 ans, en une décennie. Le screamo, contrairement à la masturbation, rend sourd. Et les vers d’oreille deviennent acouphènes à demeure.

Hier, 14 mars, les Français célébraient leur 16e Journée nationale de l’audition. Et ils se sont déjà attaqués aux mp3, légiférant sur les décibels des baladeurs. Il a fallu 200 millions d’années pour fignoler notre canal auditif et une dizaine seulement pour tout bousiller. Le tiers des Américains ont déjà développé des troubles auditifs.

Après avoir interviewé astronaute, moines, audiologistes, scientifiques de l’ouïe, policier, soldat (le silence de la guerre), chasseur, marchands, propriétaires d’autos modifiées aux systèmes de son atteignant 170 décibels (boom car) qui font craquer les pare-brise, George Prochnik nous explique qu’on retrouve très peu de sons puissants dans la nature, hormis le tonnerre. Malgré sa faculté d’adaptation, l’être humain ne peut pas se protéger contre les bruits agressants, sauf en coupant le son et en créant une barrière interne. Vous dites ?

Une sirène d’ambulance provoquera toujours une augmentation de la pression sanguine, la dilatation des pupilles, etc. Nous sommes biologiquement conçus pour prendre nos jambes à notre cou devant l’envahisseur. Les scientifiques interrogés attribuent à l’ouïe notre survie en tant qu’espèce, rien de moins. Et ils n’ont toujours pas mesuré les effets d’une chanson de Céline Dion sur la surdité précoce.

« Le silence nous rend capable de départager ce qui est important de ce qui ne l’est pas », explique l’auteur. Il suggère de rechercher les endroits contre-culturels, désertés, de marcher en sens inverse de la foule, vers les cimetières les jours de semaine, les églises muettes, les musées poussiéreux, les bibliothèques de quartier (je vous ai déjà parlé de celle des Dominicains), pour retrouver un semblant de paix auditive. Même les fonds de piscine ont été équipés de haut-parleurs, interdisant aux plus désespérés d’en finir avec la musak.

Trop nombreux sur terre (et sous terre aussi)

Si les mystiques et les artistes ont usé et abusé du silence, c’est qu’il est le plus court chemin vers soi, pas une fin en soi. Déjà, en 1961, un spécialiste américain de l’audition avait fait une étude auprès des membres d’une tribu reculée d’Afrique, les Mabaan, ne faisant usage ni de tambours, ni d’armes à feu. 53 % d’entre eux étaient capables de distinguer des sons que seuls 2 % des New-Yorkais parvenaient à identifier. Imaginez 50 ans plus tard…

Nous sommes devenus bruyants exprès pour marquer le territoire, afficher notre supériorité, envahir, punir, empiéter, nous analgésier. Nous voici pris au piège de notre propre enflure. En anglais, noise partage les mêmes racines latines que « nausée ».

On dit du silence qu’il est le langage de l’âme. Peut-être l’avons-nous perdue, tout simplement. Jadis, j’ai souvenir d’avoir visité (avec un curé défroqué) le cimetière caché sous le Grand Séminaire de Montréal, rue Sherbrooke; des tombes de prêtres recouvertes de terre battue, une croix de bois pour seule épitaphe; un Montréal underground comme on n’en fait plus. Le silence des morts, m’étais-je dit, est peut-être la seule réponse valable. Et c’est sûrement pourquoi il nous fait si peur.

Comme le paradis, je vous le souhaite avant la fin de vos jours. »

***

A

vendredi 15 mars 2013

Chute dramatique du nombre de monarques au Mexique




Associated Press, Mexico
Article publié dans La Presse le 14 mars 2013

«Le nombre de monarques qui ont trouvé refuge cet hiver au Mexique a chuté de 59%, atteignant le niveau le plus bas des 20 dernières années.

Il s'agit d'un troisième déclin annuel consécutif pour ces papillons oranges et noirs qui quittent le Canada et les États-Unis afin de passer l'hiver dans les forêts de sapins qui trônent au sommet des montagnes au centre du Mexique. Un recul a été constaté au cours de six des sept dernières années, et il n'y a plus maintenant qu'un quinzième du nombre papillons dénombrés en 1997.

Ce déclin de la population des monarques s'inscrit dorénavant dans une tendance statistique à long terme, ont prévenu les experts, et ne peut plus être attribué à une combinaison d'événements annuels ou saisonniers.

L'exploitation forestière illégale, les changements climatiques et des pratiques agricoles douteuses - notamment le recours aux pesticides qui détruisent les plantes dont se nourrissent les papillons - ont tous été évoqués.

Le directeur du Fonds mondial de la nature (WWF) au Mexique, Omar Vidal, a prévenu que le Canada, les États-Unis et le Mexique se partagent la responsabilité de protéger les monarques. Il a ajouté que le Mexique a fait sa part en luttant contre l'exploitation forestière illégale.

Les montagnes où les monarques passent l'hiver ont été désignées réserve naturelle en 2000. Malgré cela, en 2005, l'exploitation forestière y anéantissait toujours 1140 acres annuellement. Mais une étude aérienne réalisée en 2012 n'a détecté aucune exploitation forestière importante dans la réserve, une première depuis l'an 2000.

Cette année, les papillons ont recouvert 2,93 acres de forêt, comparativement à 7,14 acres l'an dernier.»

jeudi 14 mars 2013

Serions-nous plus menteuses que les hommes ?



Les réseaux sociaux font-ils mentir les femmes?
Chronique de Fabien Deglise publiée dans Le Devoir le 12 mars 2013

« À beau mentir qui vient... d'un réseau social. Et encore plus s'il s'agit d'une femme. C'est qu'une sur quatre aurait tendance en effet à exagérer un peu la réalité, une fois par mois, pour masquer l'ennui et la vacuité de son quotidien ou encore pour briller un peu plus dans ses cercles numériques. Une enquête menée en Grande-Bretagne par OnePoll vient de les démasquer.

Dans l'ensemble, un tiers des répondantes à ce sondage ont admis ne pas être totalement honnêtes dans les réseaux sociaux, comme Facebook ou Twitter, alors qu'un autre 20 % reconnait même mentir ou exagérer une fois par mois. Comment? En affirmant, par exemple, faire quelque chose d'excitant alors qu'en fait elles sont seules chez elles. Ces mensonges numérisés touchent également les activités en vacances ou au travail qui, dans les réseaux sociaux, sont victimes également de ces légères distorsions.

Pour une répondante sur 10, ces manipulations du réel à des fins sociales se font même chaque semaine, précise l'enquête dont les grandes lignes viennent d'être présentées dans les pages du quotidien The Telegraph.

Selon les auteurs de l'enquête, ces mensonges germent dans les réseaux sociaux de peur de montrer le vide de son existence, par jalousie envers ceux et celles qui dévoilent des vies numériques trépidantes —parfois sans doute, en exagérant un peu —, mais également pour impressionner ses amis, et donc exister un peu plus dans ces nouveaux espaces de socialisation.

Paradoxalement, élaborées pour se rapprocher des autres, ces stratégies de communication auraient l'effet inverse, précise une psychologue, en attisant le sentiment de déconnexion et d'isolement, peut-on lire.

L'étude, un peu intéressée puisque commandée par Pencourage, un nouveau réseau qui cherche à cultiver le vrai en transposant en ligne le principe du journal intime — en gros —, ne cible que les femmes. Prétendre toutefois que les hommes ne succombent pas, eux aussi et sans doute dans des proportions similaires, à l'appel de la distorsion en format numérique, ne serait finalement que mensonge.»

mardi 12 mars 2013

Big Brother sur Facebook



Le bouton «j'aime» en dit long sur les usagers de Facebook
Article publié dans La Presse le 11 mars 2013
Agence France-Presse (Washington)


« Une étude britannique affirme qu'il est possible d'en apprendre beaucoup sur les internautes en fonction de leurs clics sur les boutons «j'aime» de Facebook, notamment sur leur race, leur âge, leur sexualité, leur orientation politique et même sur leur quotient intellectuel.

Les chercheurs travaillant sur cette étude, publiée lundi aux États-Unis, ont conçu des algorithmes qui permettent de créer des profils de personnalités révélant potentiellement des informations personnelles et intimes des utilisateurs de Facebook.
Ces modèles mathématiques sont exacts à 88% pour déterminer la sexualité des hommes et à 95% pour distinguer entre les Noirs et les Blancs aux États-Unis. Chrétiens et Musulmans ont été correctement identifiés dans 82% des cas.

Ces algorithmes ont aussi pu extrapoler des informations permettant de déduire l'orientation sexuelle, si l'utilisateur se droguait ou encore si ses parents étaient divorcés.

Ces données peuvent être exploitées à des fins commerciales pour cibler des campagnes de publicité ou de marketing mais elles peuvent aussi révéler des informations très personnelles, souligne David Stillwell de l'Université de Cambridge (Royaume-Uni), un des co-auteurs de cette recherche parue dans les Comptes-rendus de l'Académie américaine des sciences (PNAS).
Il relève que les mêmes informations pourraient être obtenues en utilisant d'autres données numériques des moteurs de recherche, des courriers électroniques et à partir aussi de téléphones portables.
Pour cette étude, les chercheurs ont examiné 8000 utilisateurs de Facebook aux États-Unis, qui ont été volontaires pour utiliser le bouton «j'aime», fournir leur profil démographique et participer aux tests psychométriques.
Les prédictions s'appuient dans une large mesure sur des déductions à partir d'énormes quantités de données.
Ainsi l'homosexualité est induite non pas parce que les utilisateurs cliquent sur des sites gays mais en fonction par exemple de leurs préférences musicales et des émissions de télévision qu'ils regardent.
Les personnes avec un quotient intellectuel (QI) élevé aiment le plus souvent des émissions politiques satiriques ou le film classique américain To Kill a Mockingbird ou encore The Godfather.

Ceux avec de bas QI préféraient dans cette étude les chanteurs Harley Davidson et Bret Michaels du groupe de rock Poison, populaire dans les années 80, selon ces chercheurs. »

lundi 11 mars 2013

Un voeu pieux !




Ah, on l’adore, monsieur le chroniqueur, lorsqu’il ironise en prenant le contre-pied de ses collègues et qu'il bascule dans l'absurde ! On va s'ennuyer ferme...

Une chronique de Pierre Foglia publiée dans La Presse du 9 mars 2013-03-11

Ce serait formidable

« Ben moi, je l'ai trouvée très bien, l'entrevue de Céline Galipeau avec le cardinal Ouellet. Respectueuse et tout. Très respectueuse. Je sais, mon collègue Patrick Lagacé n'est pas de mon avis. Je vais vous dire un truc sur Lagacé, vous allez tout comprendre: il est même pas baptisé.

Contrairement encore à Patrick Lagacé qui disait pis que pendre de notre cardinal, moi, j'aimerais bien que Ouellet devienne pape. Vous l'avez sans doute remarqué depuis toutes ces années, je ne déteste pas quand le pire arrive, c'est là mon fond trotskiste - les trotskistes, qui sont les plus ratoureux des gauchistes, voient dans le pire la promesse de jours meilleurs et c'est l'évidence: plus ça val mal, plus on peut raisonnablement espérer que ça ira mieux bientôt.

Bref, ce serait formidable pour les catholiques trotskistes que Ouellet soit élu pape. Et même pour le tout-venant du catholique. J'aime quand les catholiques ont mal à leur Église, quand ils sont en rupture avec Rome, quand ils disent des choses comme: l'Église, c'est nous après tout! J'aime quand ils se montrent plus évangéliques que le pape, ce qui ne manquerait pas si Ouellet est élu.

Aussi je trouve l'ouaille moins bêlante quand elle renâcle, et soyez-en assuré, elle renâclerait avec Ouellet.

Je trouve surtout que mieux vaut un très mauvais pape que pas de pape du tout, comme les musulmans, par exemple. Pensez-y, ce serait drôlement bien, un pape musulman, en ce moment pour dire aux sunnites d'arrêter d'écoeurer les chiites, pour dire aux salafistes de se calmer le pompon, des fois c'est bien utile, un grand chef qui supervise tout, qui tient son autorité directement de Dieu, comme Mahomet, oui, mais vivant comme le pape et capable de mettre son poing sur la table: vos gueules, on ne s'entend plus prier. Si les musulmans avaient un pape, au moins, on dirait que c'est la faute de leur putain de pape au lieu de dire comme en ce moment: c'est la faute des musulmans.
Revenons en Abitibi, Ouellet pape, ce serait formidable aussi pour le tourisme régional. Bien plus gros que le festival du cinéma de Rouyn, que le tour de l'Abitibi à vélo ou que le festival du camion d'Amos.

Enfin, cela relancerait aussi l'intérêt qu'on nous porte en Europe où le Québécois n'est presque plus exotique.
Ah! vous êtes québécois! Vous devez connaître le pape?
Non, mais je connais Céline Galipeau.

Le trou
Il y a quelques jours, un articulet dans notre journal racontait l'histoire d'un monsieur en Floride «avalé par un trou géant».

«Un habitant de Tampa a disparu après qu'un trou géant s'est soudainement ouvert juste sous sa chambre à coucher... les autorités ont découvert en entrant dans la maison un trou d'une dizaine de mètres de diamètre et 30 mètres de profondeur.»
Aux nouvelles de NBC, on nous a montré la maison de ce monsieur Jeff Bush, un bungalow cossu, de l'extérieur on ne se doute de rien, on frappe à la porte, bonjour, madame, pourrais-je parler à Jeff?

Elle sanglote en menant le visiteur au bord d'un grand trou au bout du couloir: il est là.
La chose est plus fréquente qu'on le croit. Sauf qu'elle se présente rarement aussi dramatiquement. La plupart du temps, la personne disparaît dans un trou sans qu'il y ait de trou apparent. Qu'est-ce qu'un trou? Du vide. Le vide est partout autour de nous, entre les objets, entre les personnes, entre vous et moi: que des trous, que du vide.
Je disais donc que la plupart du temps, la personne disparaît dans un trou sans qu'il y ait de trou. Mieux que ça: la personne disparue est toujours là. On ne sait pas qu'elle est disparue. On ne s'en doute pas, elle mange, elle boit, elle fait pipi, elle regarde la télé (beaucoup), elle dit yé! quand ils annoncent à la radio qu'un Canadien a encore gagné l'épreuve des bosses aux championnats mondiaux des bosses, elle renoue ses lacets quand ils sont défaits, pourtant, elle n'est plus là. Elle a été vidée de l'intérieur. C'est ce que fait le vide: il évide.

La chose est plus fréquente qu'on le croit. C'est par centaines de milliers que des humains disparaissent chaque jour dans des trous, c'est juste qu'on ne s'en doute pas, ils mangent, ils boivent, ils font pipi, mais ils ne sont plus là.
Sont où? Dans la grande Béance elle-même. Sont retournés au magma originel.

PÉPÈRE LA VIRGULE Dans le stationnement du CPE des Jardins à Lévis, cet avis: Réservé aux usagés. Doit-on comprendre que vous n'acceptez que les vieux bazous?
Gardez-vous cependant de corriger la faute d'orthographe - Réservé aux usagers - en en commettant une autre, de sens celle-là, un usager étant celui qui fait usage, en réservant votre stationnement aux usagers, vous le réservez à tout le monde.

Pas facile, le français, non madame, à qui le dites-vous, je connais un chroniqueur aussi brillant qu'aimable qui parlait l'autre jour dans sa chronique de l'homme de Néerdental au lieu, bien sûr, de l'homme Néandertal. Excusez-le, il n'est pas allé à l'école longtemps.
Parlant d'école... la CSDM offre à ses élèves du primaire, les lundis, un cours d'initiation au jeu d'échecs. Les parents ont reçu une fiche d'inscription portant en en-tête: Initiation à l'échec.
Ah ah! C'est pour ça!

NOTA BENE Pour revenir deux secondes à ma théorie du trou, il n'y pas que des personnes qui disparaissent dans les trous, des fois, c'est des pays entiers. Je pars justement cette semaine pour un pays qui a été aspiré par le vide il y a une dizaine d'années, non, ce n'est pas le Luxembourg. Anyway, pas sûr que je vous écrive de là-bas. Ça pourrait prendre un petit bout avant qu'on se reparle. »

dimanche 10 mars 2013

Le mépris des marchands



Quand le français se fait discret
Article de Louise Leduc publié dans La Presse, le 10 mars 2013

« Qu'en est-il du visage français du Québec? Une petite virée dans n'importe quel centre commercial de la région montréalaise - le Carrefour Laval, à tout hasard - illustre bien les défis qui attendent le prochain président de l'Office de la langue française.

Bath and Body Works. Forever 21. Amnesia. Body&Beach. American Eagle Outfitters. Stitch It - Clothing Alteration. Payless Shoe Source. Mexx Kids. Style Exchange. Quicksilver. Rocky Mountain Chocolate Factory. Sunglass Hut. Victoria's Secret. Pink. Etc. Au Carrefour Laval, le quart des noms de magasins est en anglais et le descriptif français, quand il y est, vire très souvent l'esprit de la Charte de la langue française à l'envers.

En effet, comme la loi ne précise pas l'ampleur que doit avoir un générique, c'est souvent en tout petits caractères que le descriptif français est ajouté, en dessous d'un nom de magasin en anglais en très grosses lettres.

Il faut être très attentif devant The Children's Place pour voir le descriptif «vêtements et accessoires pour enfants», tout comme il faut s'approcher de près pour voir le mot «Créations» au-dessus de «Chop Crazy».

Sous les libéraux, alors que le Tout-Montréal se scandalisait de l'omniprésence de l'anglais dans la métropole, une campagne dite «d'information» a été lancée pour inciter les entreprises à franciser leur nom ou, à défaut, à ajouter un descriptif en français.
Le fait d'être conforme aux yeux de l'Office québécois de la langue française tient à de bien petites choses. On verra par exemple au Carrefour Laval «Le» Body Shop, «Le» Smart Burger.


ILLUSTRATION LA PRESSE
N'empêche, pour six multinationales, c'est trop. Ainsi, Best Buy, Costco, Gap, Old Navy, Guess et Walmart contestent l'obligation d'un descriptif ou d'un nom en français dans une cause attendue à la Cour supérieure dans les prochains mois.

Les nouveaux magasins Walmart ajoutent la mention «Super Centre» quand ils incluent des pharmacies ou des produits d'épicerie, mais l'entreprise ne veut pas ajouter de mots français à ses autres magasins.

L'offensive en cours des six multinationales a-t-elle incité l'Office à ralentir la cadence de sa «campagne d'information»? Le porte-parole de l'Office, Martin Bergeron, a indiqué (avant le scandale du pastagate et avant la démission de Louise Marchand) que l'Office continuait comme à l'habitude à réclamer des entreprises qu'elles ajoutent au moins un descriptif en français.

Au cours des dernières semaines, en se justifiant par un nécessaire réalignement après le pastagate, l'Office de la langue française et la ministre Diane De Courcy se sont refusés à tout commentaire sur l'omniprésence de l'anglais dans l'affichage.

Le Carrefour Laval et Cadillac Fairview (qui l'administre) n'ont pas voulu faire de commentaires non plus. De toute manière, c'est ainsi un peu partout. Fait à noter, au Carrefour Laval, si le quart des magasins a un nom anglais, les autres ne renforcent pas nécessairement le visage français du Québec (Browns, Reitmans, Terra Nostra, Zaxe, Clarks, Briks, Rudsak, Aveda, La Senza, Michael Kors, etc.).

Plusieurs magasins que nous avons joints - Victoria's Secret et compagnie - n'ont pas donné suite à nos appels.

Pour sa part, Aldo, une entreprise montréalaise qui possède notamment les magasins Little Burgundy et Spring, nous a précisé, par l'entremise de sa porte-parole Wendie Godbout, qu'un processus est justement en cours, depuis l'automne 2012, pour ajouter des génériques en français qui ont été approuvés par l'Office. Le processus devrait être terminé d'ici les prochains mois. Little Burgundy sera bientôt précédé du mot «Espace» et Spring, du mot «Boutique».
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Des entreprises qui ont déjà été plus réceptives
Alors que Walmart fait partie des entreprises qui contestent l'obligation d'ajouter un descriptif en français au Québec, des symboles chinois ornent ses magasins en Asie et des magasins Walmart entièrement en espagnol ont été ouverts dans le sud des États-Unis. Pourquoi, dans ces conditions, ne pas s'adapter aussi au marché québécois? À ce sujet, Walmart Canada nous a demandé de téléphoner à Wal-Mart aux États-Unis, qui ne nous a pas rappelés. À une certaine époque, plusieurs multinationales sont allées jusqu'à franciser leur nom: Poulet frit Kentucky (Kentucky Fried Chicken), Dormez-vous (Sleepless Country), Bureau en gros (Staples), Pharmaprix (Shopper's Drug Mart). Val Outmezguine, relationniste chez Staples, explique que l'entreprise a voulu être respectueuse du marché québécois. «Avant d'arriver, nous avons conduit une étude de marché et nous avons réalisé qu'un nom en français nous permettait d'être mieux perçus des francophones.» Frank Pons, professeur de marketing à l'Université Laval, relève qu'officiellement, les grandes entreprises invoqueront les coûts additionnels et l'atteinte non souhaitable à leur image de marque pour ne rien franciser. «Mais dans les faits, je crois que si les grandes entreprises ne se donnent pas la peine d'ajouter quelque mot de français que ce soit, c'est qu'elles constatent que cela ne leur fait pas perdre de consommateurs. Si l'opinion publique ne se soulève pas trop non plus, elles ne voient pas d'intérêt à changer quoi que ce soit.» La petite taille du marché québécois n'aide pas non plus, croit M. Pons, qui dit avoir hâte de voir comment Target se comportera.

Très peu d'amendes
Bien que les noms d'entreprises en anglais pullulent à Montréal - et ailleurs -, très peu d'amendes sont distribuées. Ainsi, entre avril 2011 et décembre 2012, René Verret, porte-parole au Bureau du directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), signale que deux constats pour affichage non conforme à la Charte ont été faits, et onze autres pour affichage problématique du nom d'entreprise dans une autre langue. Les rares amendes distribuées varient entre 250 et 1500$.
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Ce que dit la loi
L'article 63 de la Charte de la langue française précise que le nom d'une entreprise établie au Québec doit être en français. Mais il y a une exception de taille: les noms d'entreprise qui sont enregistrés comme marques de commerce. N'empêche, sous les libéraux, l'Office a commencé à faire campagne pour que le nom d'entreprise anglais soit accompagné d'un mot ou d'une expression descriptive (générique) en français, ou encore d'un slogan en français qui décrit les produits ou les activités de l'entreprise. Cette obligation est contestée devant les tribunaux par six multinationales.»