Une chronique de Rima Elkouri
publiée dans Cyberpresse, le 18 février 2013
Chronique texane sans fusil
La nuit tombait sur
Houston. On s'apprêtait à prendre la route vers San Antonio. «All right. Be
safe!», a dit Pat, la charmante dame que je venais d'interviewer pour un
reportage qui sera publié au printemps.
Quand elle a dit «All
right. Be safe!», avec son accent
rebondissant du Sud, j'ai pensé à ce passage surréaliste de la rubrique
«Dangers» de mon guide Lonely Planet sur le Texas. On y rappelle que, depuis
1995, grâce à (ou à cause de) George W. Bush, les citoyens texans ont le droit,
à certaines conditions, de se promener avec une arme à feu dissimulée pour
pouvoir se défendre. Un droit obtenu à la suite d'une tuerie qui avait fait 23
morts dans un restaurant de Killeen, au centre du Texas, en 1991. Qui se
souvient de Killeen?
Les conseils du Lonely Planet
afin d'éviter de se retrouver dans la ligne de mire: «Ne vous disputez pas avec
d'autres automobilistes et ne faites jamais de gestes grossiers. Si la police
vous arrête, gardez vos deux mains bien en vue en tout temps (préférablement en
haut du volant) afin que l'agent ne puisse confondre vos mouvements avec un
reach (le fait de prendre une arme).»
Franchement, le guide de
voyage exagère un peu, non? ai-je dit en riant à Pat, qui n'avait pas tout à
fait le profil d'une cow-girl friande d'armes. «Non, il n'exagère pas,
m'a-t-elle répondu, l'air grave. C'est la triste réalité ici. Une réalité qu'il
faut dénoncer.»
Au pays du sacro-saint
deuxième amendement, le lobby des marchands d'armes s'évertue à faire croire
que la liberté et la sécurité s'obtiennent à la pointe du fusil. Qu'importe si
les faits hurlent le contraire, ses efforts portent leurs fruits. Au Texas, la
culture des armes à feu s'affiche sans gêne. «We don't dial 911», clament
fièrement des t-shirts souvenir, ornés d'un gros revolver couché sur une carte
du Lone Star State. Juste en 2012, près de 150 000 permis d'armes à feu
dissimulées ont été accordés au Texas. Et depuis la tuerie de Newtown, les
ventes d'armes ont bondi. «Achetez-en pendant que vous pouvez encore le faire»,
clament des publicités de magasins d'armes vues sur l'autoroute près de
Houston.
Le mois dernier, le ministre
de la Justice du Texas a même offert l'asile, si je puis dire, aux New-Yorkais
armés qui se sentent lésés par les mesures de contrôle des armes adoptées par
leur État. «Gardez vos armes, venez au Texas.»
«Ce n'est pas de la paranoïa
que d'acheter une arme. C'est une question de survie», a plaidé cette semaine
Wayne LaPierre, de la National Rifle Association. Le porte-parole principal du
lobby des armes aux États-Unis a répondu par un grand délire au vibrant appel
d'Obama pour le renforcement du contrôle des armes, dans son discours sur
l'état de l'Union. Résumé du délire de la NRA: l'apocalypse guette les
États-Unis d'Obama. La liste des périls est longue: «Ouragans. Tornades.
Émeutes. Terroristes. Gangs. Criminels isolés.» La liste de solutions est
courte et obscène: acheter plus d'armes pour mieux se protéger.
L'argument sécuritaire est un
spectaculaire mensonge. Environ 32 000 Américains, dont 3000 enfants, se tuent
ou sont tués chaque année avec des armes à feu. Combien tuent dans ce que l'on
considère être un geste d'autodéfense? Pas plus de 280, selon les données du
FBI. Les autres, plus de 99%, meurent emportés par un mythe qui fait le bonheur
des marchands d'armes.
«Il n'y a pas de fin à la
stupidité et à la douleur que les gens vont continuer à endurer parce que nous
acceptons d'avoir près de 300 millions d'armes à feu dans notre société. On n'a
pas fini avec cette angoisse», m'a dit Rick Halperin, professeur au département
d'histoire de l'Université Southern Methodist, à Dallas.
Le réel problème de ce pays,
c'est son amour de la violence, croit ce professeur, directeur d'un programme
d'études des droits de la personne. «On peut être tué dans un crime de
stupidité n'importe où dans ce pays. Dans notre maison, en classe, dans un
bureau, dans une église, dans un cinéma, dans un supermarché! Parce que nous
avons toutes ces armes dans notre société.»
On oubliera Newtown, comme on
a oublié Killeen. Il y aura d'autres tueries. C'est écrit dans le ciel.
«Pourquoi? Parce qu'il peut y en avoir! Parce que nous avons assez de gens
déséquilibrés ou ayant toutes sortes de problèmes qui ont accès à des armes
d'assaut et qui vont tuer beaucoup de gens innocents.»
Trente-deux mille Américains
qui meurent chaque année à cause de la folie des armes, c'est comme une petite
ville qui disparaît chaque année a fait remarquer le professeur indigné.
Imaginez. En un an, l'équivalent d'une ville comme Sainte-Julie disparaît de la
carte. L'année suivante, c'est tout Val-d'Or. L'année d'après, tout
Pointe-Claire...
Trente-deux mille morts
chaque année à cause des armes. Et certains, cyniques, appellent ça de la
«survie».
Hummm c'est vraiment con....
RépondreSupprimerParfois je me demande: Y a personne de sensé la dedans ??
En tout cas, s'il y en a, ce ne sont pas ceux qui font les lois...!
RépondreSupprimerAlors, le soleil est avec vous?
Parfois j'ai l'impression que nous en sommes à la mode du sens démesuré un peu comme au temps du Far-west... Je veux quelque chose je le prend et tue la personne à qui cet objet appartient...
RépondreSupprimerDe nos jours on en est à je fais un geste brusque il a le droit de me tuer car c'est de la légitime défense...Comme dans le temps du far-west . C'est à se demander si notre civilisation a vraiment évolué !
Souris
Évolution ou pas j'ai l'impression que certains hommes sont encore en mode chasse comme au temps de la préhistoire.
RépondreSupprimerIl ne faut pas être trop sain d'esprit pour permettre une épidémie de ce genre. «Je ne suis pas heureux, je tue, il m'a parlé d'un ton rude, je le tue, je n'aimais pas l'école, je tue les enfants et les profs». C'est un non sens mais bien la réalité d'aujourd'hui.
Mon grand-père italien (pas plus croyant qu'il le fallait) disait toujours la fin du monde...c'est de l'homme qu'elle va venir!.
Coucou Jo Blo et Souris.
Bonne journée
bien d'accord avec vous! il y a quelqu'un qui réfléchit quelque part aux USA???
RépondreSupprimerCoucou à toi aussi Puce, ainsi qu'à Jo qui est parti se dorer la couenne au soleil et Marina Mijote...
RépondreSupprimerBien entendu je n'oublie pas notre hôtesse Rachel !
Souris
Bonjour Souris,
RépondreSupprimerÀ toi et à ta maisonnée,
bonne journée gourmande!
Mais aussi la plupart des jeux vidéos(jeunes)il faut qu'ils tuent pour gagner c'est le jeu toujours tuer, alors,,,dans la vrai vie ils veulent tuer aussi pour gagner.
RépondreSupprimerP.S. Je suis un peu en retard dans ma correspondance...vacances, petit laptop qui parfois me demande de la patience....enfin ont peu pas tout avoir loll
Un coucou à Puce et Souris
Bonjour Jo,
RépondreSupprimerJe suis d'accord, les jeux vidéo banalisent la violence et l'acte de tuer. Et la facilité avec laquelle on peut se procurer des armes à feu aux É.U. ne fait qu'aggraver la situation. Il faudra que le gouvernement s'en mêle.
Bonne journée sous le soleil!