mardi 11 avril 2023

Jour 412 - Emprisonnée depuis 1 an en Russie pour avoir collé des messages contre la guerre en Ukraine


Depuis un an, Alexandra (Sasha) Skochilenko est emprisonnée en Russie pour avoir remplacé cinq étiquettes de prix dans un supermarché de Saint-Pétersbourg par des messages contre la guerre en Ukraine. Un geste qui pourrait lui valoir jusqu’à 10 ans de prison. Pendant que son avocate se dit persuadée que la Russie de Vladimir Poutine veut faire de son cas un exemple, sa conjointe mentionne avoir perdu tout espoir qu’elle soit libérée au terme d’un procès qui s’étire en longueur.

« Le seul aspect qui me donne un peu d’espoir, c’est qu’une fois que le processus judiciaire sera terminé et que Sasha sera déplacée dans une colonie pénitentiaire, je puisse devenir son “défenseur public” et la voir tous les jours », souffle Sonia Subbotina, 30 ans, jointe ces jours-ci à Saint-Pétersbourg.

Depuis le 11 avril 2022, date de l’arrestation et de l’incarcération de Sasha, les deux femmes n’ont pu se parler. « Aux yeux de la loi russe, nous ne sommes rien l’une pour l’autre », glisse-t-elle. Puisque les unions homosexuelles ne sont pas reconnues en Russie, les visites leur sont interdites. Une absence d’officialisation de leur relation qui a aussi permis au procureur de citer Sonia comme témoin au procès — ce qui ne peut être requis lorsqu’un couple est marié — et qui l’empêche, de surcroît, d’assister aux audiences. 

« Mais chaque fois, je rentre tout de même dans la salle d’audience quelques secondes avant d’être chassée, indique Sonia. J’ai juste le temps de dire à Sasha quelques mots. Je lui dis que je m’ennuie d’elle, que je l’aime et que je l’attends. » 

Prisonnière d’opinion 
Depuis le déclenchement de l’« opération militaire spéciale », Alexandra Skochilenko est devenue l’une des prisonnières d’opinion opposée à la guerre en Ukraine les plus connues en Russie, tout comme à l’extérieur de ses frontières. « Pour cette raison, le gouvernement ne lui accordera pas la liberté [pendant la tenue de son procès ou après] pour s’assurer que d’autres personnes ne soient pas tentées de faire ce qu’elle a fait », dénonce en entrevue son avocate, Yana Nepovinnova. L’artiste de 32 ans fait face à des accusations criminelles en vertu de la loi interdisant, depuis mars dernier, de diffuser de « fausses informations » sur les actions menées par l’armée russe en Ukraine. D’autres Russes ayant dû répondre aux mêmes accusations « et qui n’ont pas plaidé coupables ont été envoyés en prison pour 6, 7 ou 8 ans », rapporte Me Nepovinnova. Ce qui fait craindre le pire pour Sasha. 

En cour, la jeune femme a admis avoir changé cinq étiquettes de prix dans un supermarché pour les remplacer par des étiquettes arborant un message antiguerre. L’une de ces étiquettes mentionnait que « l’armée russe a bombardé une école d’art de Marioupol où environ 400 personnes s’étaient réfugiées pour échapper aux bombardements ». Un événement qui avait fait les manchettes de plusieurs médias en mars 2022. 

Bien qu’elle reconnaisse ce geste, « Sasha n’admet pas que les informations étaient fausses ou qu’elle savait que les informations étaient fausses lorsqu’elle les a diffusées » — l’élément que la poursuite doit prouver —, explique son avocate. 

Au procès, qui se tient à Saint-Pétersbourg, la poursuite a terminé de présenter sa preuve. C’est désormais au tour de la défense de soumettre ses arguments, ce qu’elle fera en citant, notamment, les sources d’information médiatiques qui ont nourri la réflexion de Sasha. « Elle avait aussi des sources d’information personnelle — des personnes de confiance, [des Ukrainiens qui lui ont témoigné de la situation qu’ils vivaient dans des conversations écrites déposées en preuve], mentionne son avocate. Cela fait en sorte que ça ne pouvait pas être des informations qu’elle savait fausses. » 

Et même si la défense n’a pas à prouver que les informations sont vraies — mais seulement que Sasha ne savait pas qu’elles étaient « fausses » —, « on va aussi présenter des preuves que les informations sont véridiques », stipule Yana Nepovinnova. 

Raid policier [...] 

 Magdaline Boutros 
Le Devoir, le 11 avril 2023

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