Des souris et des hommes
Cela ne vous
étonnera guère si je vous dis que j’aime les souris. Naturellement, je ne
serais pas un chat si je ne les dévorais pas en m’en délectant. Toutefois, vous
serez sans doute surpris si j’ajoute que j’ai une admiration sans borne pour
des qualités méconnues et plutôt éloignées de leur réputation. Car s’il
m’arrive d’en manger moins souvent que je le voudrais, c’est parce qu’elles
maîtrisent à la perfection l’art de la ruse. Me doutant que vous ne me croirez
pas, je vous conterai une anecdote qui s’est déroulée cette semaine. Et elle
vous convaincra encore mieux puisqu’elle ne m’est pas arrivée à moi, mais à mon
père adoptif. Est-ce que je me
trompe, je vous entends sourire…!
Avant de
m’attaquer aux souris, je dois vous parler des écureuils, une autre espèce
éminemment astucieuse. J’ai parlé dans un
billet récent du cadeau que mon père a offert à ma mère à l’occasion des
Fêtes, une mangeoire destinée aux oiseaux. Non seulement cette attention
a-t-elle remporté un succès fou auprès des mésanges des alentours, mais les
geais bleus, les tourterelles, les chardonnerets, les pics à tête rouge, les
sittelles et les juncos ardoisés se sont pointés à leur tour. Malheureusement,
les écureuils sont bientôt apparus, venus faire une démonstration de leur
voracité. Ils se sont effrontément appropriés la mangeoire, privant de leur
pitance nos amis ailés, lesquels, contrairement aux rongeurs, n’ont pas la
possibilité d’emmagasiner des provisions dans les arbres. L’homme de la maison
a donc entrepris une lutte serrée avec ce qu’il a été convenu d’appeler nos
ennemis numéro un.
J’ai surveillé
avec attendrissement les manœuvres de mon père pour déloger les importuns. Avec
une patience de chat, il a tout fait pour leur bloquer le passage. Je ne
détaillerai pas tous les moyens qu’il a pris, cela risque de vous ennuyer.
Mais la grande assiette à pizza percée en son centre (au grand désespoir de ma
mère) et enfilée sur une branche, l’abat-jour la surmontant et la planchette de
bois en suspension se sont montrés inefficaces. Suivant le conseil d’une amie,
l’homme de la maison a fini par trouver dans une jardinerie un crochet du
berger, c’est le joli nom qu’on donne à un long poteau muni de deux suspensoirs et censé déjouer
l’agilité de nos ennemis. C’était sous-estimer leur intelligence; le même
après-midi, avec consternation, nous avons aperçu un écureuil qui se balançait
comme pour nous narguer, suspendu à la mangeoire qu’il venait de vider.
N’écoutant que sa patience, mon père a eu l’idée de graisser le poteau que les
intrus parvenaient à escalader en dix secondes afin de se hisser à la
mangeoire. Pendant plusieurs jours, mon père jubilait, croyant avoir gagné la
bataille. Mais hélas, il a fait très froid, la graisse a figé et les écureuils
ont recommencé leur manège.
Mais revenons à
mes souris, par quelle ruse ont-elles pu venir à bout de la patience de mon
paternel ? Eh bien, dans la même semaine, l’homme a dû entreprendre une autre
lutte, cette fois contre mes meilleures amies. Les pauvres, elles étaient sûrement très
affamées, elles avaient dévoré la moitié d’un pain de savon dans le garage. Mon
père m’ayant sommé de leur faire la chasse, j’ai protesté : je n’avais aucune envie de me farcir
des souris au goût de savon Ivory… D’ailleurs, pour que mon plaisir de chasseur
soit intense et complet, j’ai besoin de l’exercer dans la nature, de préférence
sur un terrain moelleux recouvert d’herbe tendre. Déçu par mon désistement,
l’homme de la maison s’est donc procuré deux pièges, des petites trappes en bois,
et une autre guerre a commencé. Or, encore une fois, les bêtes se sont montrées
plus rusées que les hommes. Le premier jour, elles ont dévoré le morceau de fromage,
le lendemain, les bouchées de beurre d’arachide avaient disparu. Ma mère a
collaboré en coupant des morceaux minuscules, se disant que cette fois, elles
devraient se faire prendre. Eh non, au matin, le fromage était parti, les
souris étaient invisibles. Mon père a fait une autre tentative, courageusement,
naïvement je devrais dire. Et que croyez-vous qu’il arriva le quatrième jour ?
Ce n’est pas seulement le fromage qui avait disparu, mais la trappe…!
J’aime bien les
humains, ils m’ont appris à lire et à écrire. Mais je me demande si les bêtes
en général, et les souris en particulier, ne seraient pas plus astucieuses que
les hommes…!
En complément,
pour le plaisir des chats et de leurs admirateurs/trices, un conte de Grimm
Bonjour Petit Messie,
RépondreSupprimerQuelle semaine! Il y a de l'action chez toi. Ici, nous n'avons plus de problème avec les écureuils. Mon père adoptif a change de place le crochet du berger. En guettant les voleurs de pitance, je me suis aperçu que souvent, les écureuils sautaient d'une branche d'arbre pour aller sur la mangeoire. On a donc placé le crochet un peu trop loin pour qu'il ne l'atteigne, remis de la graisse sur le crochet et du coup ils ne sont plus venus. Mais j'ai contribué au problème par exemple, j'ai observé longtemps leur comportement avant d'en faire part à mon père. Il m'a écouté, enfin!
Moi, je n'ai pas de problèmes avec les souris. Mais ma mamie en avait elle! Sûrement que nos souris d'ici sont moins intelligentes que chez vous car elles se sont fait prendre avec du beurre d'arachide. Mais la meilleure, c'est la trappe qui a disparu...hi! hi! hi! je l'ai trouvé drôle ce matin.
Je te souhaite ainsi qu'à ta famille de trouver un moyen de vous débarrasser de ces petites bêtes nuisibles. C'est sûrement plus agréable pour toi de les chasser sur un tapis moelleux et de la guetter à ta guise, mais il me semble que tu pourrai à mon exemple avec les écureuils, donner un coup de main à ton père adoptif, non?
Bonne semaine
Monsieur Victor
Salut Victor,
RépondreSupprimerC'est un plaisir de te lire. Il est certain que mon père n'a pas abandonné la partie et qu'il se préparera mieux l'année prochaine.
Mais avec la neige qu'il y a ici, pas facile de déplacer le crochet et la mangeoire. Tu dois bien te douter que mon père a d'autres plans et qu'il s'en frotte déjà les mains. Les écureuils lui donnent d'ailleurs du répit depuis qu'il a suspendu une série de clochettes au poteau...
Pour ce qui est de l'aider à déloger les souris dans le garage, pas question. Tu aimerais gruger des os qui goûtent le savon, toi ? C'est vrai que le menu des derniers jours, fromage d'Oka et beurre de pinotes devraient les parfumer avec plus d'agrément.
Je vais y réfléchir...
En tout cas, merci d'être passé par ici, c'est chouette d'avoir des nouvelles de toi.